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Сцена 4. Господин Сербуа, граф де Салюр, граф де Маскаре.

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Граф де Маскаре: Savez-vous comment je conçois Dieu, dit-il: comme un monstrueux organe créateur inconnu de nous, qui sème par l'espace des milliards de mondes, ainsi qu'un poisson unique pondrait des œufs dans la mer. Il crée parce que c'est sa fonction de Dieu; mais il est ignorant de ce qu'il fait, stupidement prolifique, inconscient des combinaisons de toutes sortes produites par ses germes éparpillés. La pensée humaine est un heureux petit accident des hasards de ses fécondations, un accident local, passager, imprévu, condamné à disparaître avec la terre, et à recommencer peut-être ici ou ailleurs, pareil ou différent, avec les nouvelles combinaisons des éternels recommencements. Nous lui devons, à ce petit accident de l'intelligence, d'être très mal en ce monde qui n'est pas fait pour nous, qui n'avait pas été préparé pour recevoir, loger, nourrir et contenter des êtres pensants, et nous lui devons aussi d'avoir à lutter sans cesse, quand nous sommes vraiment des raffinés et des civilisés, contre ce qu'on appelle encore les desseins de la Providence.

Граф де Салюр: Alors, tu crois que la pensée humaine est un produit spontané de l'aveugle parturition divine?

Граф де Маскаре: Mais, mon cher, la preuve en éclate pour quiconque regarde autour de soi. Si la pensée humaine, voulue par un créateur conscient, avait dû être ce qu'elle est devenue, si différente de la pensée et de la résignation animales, exigeante, chercheuse, agitée, tourmentée, est-ce que le monde créé pour recevoir l'être que nous sommes aujourd'hui aurait été cet inconfortable petit parc à bestioles, ce champ à salades, ce potager sylvestre, rocheux et sphérique où votre Providence imprévoyante nous avait destinés à vivre nus, dans les grottes ou sous les arbres, nourris de la chair massacrée des animaux, nos frères, ou des légumes crus poussés sous le soleil et les pluies.

Mais il suffit de réfléchir une seconde pour comprendre que ce monde n'est pas fait pour des créatures comme nous. La pensée éclose et développée par un miracle nerveux des cellules de notre tête, toute impuissante, ignorante et confuse qu'elle est et qu'elle demeurera toujours, fait de nous tous, les intellectuels, d'éternels et misérables exilés sur cette terre.

Contemple-la, cette terre, telle que Dieu l'a donnée à ceux qui l'habitent. N'est-elle pas visiblement et uniquement disposée, plantée et boisée pour des animaux. Qu'y a-t-il pour nous? Rien. Et pour eux, tout: les cavernes, les arbres, les feuillages, les sources, le gîte, la nourriture et la boisson. Aussi les gens difficiles comme moi n'arrivent-ils jamais à s'y trouver bien. Ceux-là seuls qui se rapprochent de la brute sont contents et satisfaits. Mais les autres, les poètes, les délicats, les rêveurs, les chercheurs, les inquiets. Ah! les pauvres gens!

Je mange des choux et des carottes, sacrebleu, des oignons, des navets et des radis, parce que nous avons été contraints de nous y accoutumer, même d'y prendre goût, et parce qu'il ne pousse pas autre chose, mais c'est là une nourriture de lapins et de chèvres, comme l'herbe et le trèfle sont des nourritures de cheval et de vache. Quand je regarde les épis d'un champ de blé mur, je ne doute pas que cela n'ait germé dans le sol pour des becs de moineaux ou d'alouettes, mais non point pour ma bouche. En mastiquant du pain, je vole donc les oiseaux, comme je vole la belette et le renard en mangeant des poules.

La caille, le pigeon et la perdrix ne sont-ils pas les proies naturelles de l'épervier; le mouton, le chevreuil et le boeuf, celles des grands carnassiers, plutôt que des viandes engraissées pour nous être servies rôties avec des truffes qui auraient été déterrées spécialement pour nous, par les cochons.

Mais, mon cher, les animaux n'ont rien à faire pour vivre ici-bas. Ils sont chez eux, logés et nourris, ils n'ont qu'à brouter ou à chasser et à s'entre-manger selon leurs instincts, car Dieu n'a jamais prévu la douceur et les moeurs pacifiques; il n'a prévu que la mort des êtres acharnés à se détruire et à se dévorer.

Quant à nous! Ah! ah! il nous en a fallu du travail, de l'effort, de la patience, de l'invention, de l'imagination, de l'industrie, du talent et du génie pour rendre à peu près logeable ce sol de racines et de pierres. Mais songe à ce que nous avons fait, malgré la nature, contre la nature, pour nous installer d'une façon médiocre, à peine propre, à peine confortable, à peine élégante, pas digne de nous.

Et plus nous sommes civilisés, intelligents, raffinés, plus nous devons vaincre et dompter l'instinct animal qui représente en nous la volonté de Dieu.

Songe qu'il nous a fallu inventer la civilisation, toute la civilisation, qui comprend tant de choses, tant, tant, de toutes sortes, depuis les chaussettes jusqu'au téléphone. Songe à tout ce que tu vois tous les jours, à tout ce qui nous sert de toutes les façons.

Pour adoucir notre sort de brutes, nous avons découvert et fabriqué de tout, à commencer par des maisons, puis des nourritures exquises, des sauces, des bonbons, des pâtisseries, des boissons, des liqueurs, des étoffes, des vêtements, des parures, des lits, des sommiers, des voitures, des chemins de fer, des machines innombrables; nous avons, de plus, trouvé les sciences et les arts, l'écriture et les vers. Oui, nous avons créé les arts, la poésie, la musique, la peinture. Tout l'idéal vient de nous, et aussi toute la coquetterie de la vie, la toilette des femmes et le talent des hommes qui ont fini par un peu parer à nos yeux, par rendre moins nue, moins monotone et moins dure l'existence de simples reproducteurs pour laquelle la divine Providence nous avait uniquement animés.

Regarde ce théâtre. N'y a-t-il pas là-dedans un monde humain créé par nous, imprévu par les Destins éternels, ignoré d'Eux, compréhensible seulement par nos esprits, une distraction coquette, sensuelle, intelligente, inventée uniquement pour et par la petite bête mécontente et agitée que nous sommes.

Regarde ma femme, Mme de Mascaret. Dieu l'avait faite pour vivre dans une grotte, nue, ou enveloppée de peaux de bêtes. Pour qu’elle puisse faire des enfants, les éduquer, préserver son foyer. Et c’est moi, bien sûr, qui a tout fait pour l’améliorer, pour qu’elle devienne noble, raffinée, mondaine. J’ai tout fait pour qu’elle respecte son appartenance au monde animal, c'est-à-dire au monde divin, pour qu’elle devienne un être raffiné et exquis. Toute ma vie, je l’ai protégée de l’influence néfaste de notre société vicieuse. Et alors?

Господин Сербуа: Six heures du matin, messiers. Le soleil se lève. C’est le début d’une nouvelle journée.

 

 




Дата добавления: 2014-12-23; просмотров: 32 | Поможем написать вашу работу | Нарушение авторских прав




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